Huldrych Zwingli et l’universalisme protestant

La conception zwinglienne du salut chrétien s’articule à une forme d’universalisme humaniste de l’Esprit qui tranche avec les conceptions habituelles de la Réformation, mais qui fait écho à une certaine lecture de l’épître aux Romains. Quelques points de de repère sur le sujet.

1.Zwingli, père de la Réformation

Huldrych Zwingli (1484–1531) est le père de la Réforme suisse et de la branche dite « réformée » de la Réformation protestante (qu’on divise commodément en luthérienne, réformée, radicale et anglicane*).

Contemporain de Martin Luther, il a partagé avec celui-ci de nombreux points de vue à propos desquels il a sans doute subi son influence, mais les deux hommes se sont aussi durement opposés, notamment sur la question de la Cène.

Huldrych Zwingli par Hans Asper

2.Erasmien et humaniste

Disciple de l’humaniste catholique néerlandais Erasme de Rotterdam, Zwingli est lui aussi un humaniste, dont le rapport à l’héritage philosophique des Anciens est profond et complexe, et explique l’importance de la raison dans sa réflexion théologique, là où Luther la regardait avec plus de suspicion en la désignant comme « la putain du diable ».

C’est ce qui explique peut-être l’effort constant de Zwingli pour intégrer une réflexion sur la condition humaine en général à la problématique protestante du salut par la justification par la grâce, doctrine centrale de la pensée luthérienne.

3.L’universalisme de l’Esprit

Car Zwingli, à ses débuts, est d’abord un moraliste, qui prêche les exigences de l’Evangile dans l’esprit optimiste de l’humanisme érasmien. Et si l’échec de cette voie et la découverte de la pensée de Luther l’amènent à tempérer cet optimisme et amender ce point de vue en prenant en compte la pesanteur du péché dans la dépravation de l’homme, il n’en conservera pas moins une conception originale de l’oeuvre de l’Esprit.

Chez lui, « l’Esprit imprime en effet les exigences de la loi divine »** dans le coeur de chaque homme, païen ou juif, chrétien ou non, et les païens « bons et vertueux » qui ne connaissent pas le Christ ont eux-mêmes accès par là au salut, même s’ils doivent aussi celui-ci à l’oeuvre rédemptrice du Nazaréen.

En ceci, Zwingli se fait sans doute seulement l’écho de l’apôtre Paul dans le Chapitre 2 de l’épître aux Romains, mais il inaugure un véritable « universalisme spiritualiste »** absent chez Luther et chez son héritier Jean Calvin, qui préfigure peut-être celui de Friedriech Schleiermacher, le père du protestantisme libéral.

Sources
*A. Gounelle, Huldrych Zwingli, La foi réformée, Olivétan, 2000.
**J.V. Pollet, Huldrych Zwingli et le zwinglianisme, Vrin, 1988

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